Marina Rebeka chante Rachmaninov
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Timbre de diamant, legato infini, bouleversante de passion, Marina Rebeka est une diva assoluta. Qui oubliera jamais son incarnation de Norma au Capitole en 2019 ? La soprano lettone enflamme les plus grandes scènes internationales dans les rôles majeurs de Mozart, de l’opéra italien et français. Mais Marina Rebeka est également une merveilleuse artiste de concert, où elle livre les facettes les plus intimes de sa personnalité. C’est au Capitole qu’elle a choisi de réaliser un rêve et un défi : consacrer tout un récital aux mélodies de Rachmaninov. Beauté de la poésie russe, magie d’une musique à la fois tourmentée et lyrique, intensité de l’expression : tout chez Rachmaninov exalte l’auditeur et l’interprète. Un récital événement, sous le signe de l’émotion.
Entretien avec Marina Rebeka
Pourquoi avoir choisi un programme de récital entièrement consacré à Rachmaninov ?
J’aime les défis et la difficulté ! Et un récital Rachmaninov en est un énorme – j’aurais moins peur de chanter deux opéras entiers à la suite ! (rires) Mais il est le compositeur qui me bouleverse le plus. Je tourne autour de ses romances depuis que j’ai commencé à chanter, mais sans oser les aborder parce qu’elles sont redoutablement difficiles. En quelques minutes, tout votre registre est sollicité, le pianissimo dans l’aigu, le grave dramatique ; et puis, le texte, intense, très chargé émotionnellement et d’une grande complexité littéraire !
Quel est votre lien à la langue russe ?
Le russe est tout simplement ma langue maternelle : je viens d’une famille mixte, russo-lituanienne. J’ai également des parents en Biélorussie, et ma fille est à moitié ukrainienne. Je vous laisse imaginer combien nous souffrons de la situation politique actuelle, c’est si triste… J’ai été parfois confrontée aux polémiques autour de la question : faut-il jouer de la musique russe ? Mais c’est insensé ! Il faudrait réduire au silence ce que la Russie a donné de meilleur : sa musique ? Tchaïkovski, Rachmaninov ? Et de toute façon, Rachmaninov est mort américain. Il a fui la Révolution russe et a finalement été naturalisé en 1943.
Comment décririez-vous son style ?
Rachmaninov a écrit des mélodies toute sa vie, elles représentent une sorte d’autobiographie en constante évolution. Il a d’abord mis ses pas dans ceux de Tchaïkovski, dont il transcrivait les œuvres quand il était étudiant, il vient de la romance russe traditionnelle, mais il a élevé le genre vers des régions tout à fait neuves. Voyez par exemple l’opus 38. Il n’est pas très connu, et particulièrement complexe : il n’y a pas de tonalité identifiable ; le rythme est absolument irrégulier et flottant ; les poèmes, assez hermétiques, sont d’une grande modernité ; les six romances ne définissent pas un ensemble homogène mais quelque chose de puissant les relie et en fait un cycle. Rachmaninov atteint là des sommets d’inspiration, c’est inégalable. Et bien sûr, il y a la célèbre « Vocalise » sans paroles, d’une terrible difficulté, mais si émouvante ! Elle me fait toujours pleurer. Rachmaninov lui-même disait : cette pièce n’a pas besoin de paroles. Et c’est vrai, tout est dans la musique. Pour le reste, j’ai élaboré le programme en fonction des ambiances et des contrastes.
Vous avez parlé de défi : pourquoi le relever pour la première fois à Toulouse ?
Au départ, je pensais, comme à Zurich et à la Scala, combiner Rachmaninov avec des mélodies italiennes, mais honnêtement, sa musique est trop dense pour l’associer à Tosti ou Bellini… Cela ne fonctionne pas si bien. Et, pour tout vous dire, j’ai le projet d’enregistrer un CD entièrement consacré à Rachmaninov. Il est essentiel pour moi de mettre un programme si exigeant, et si intense, à l’épreuve du public. Or je me sens en confiance au Capitole, et j’ai envie de donner le meilleur. Le public toulousain sera mon inspiration… et mon juge !
Propos recueillis par Dorian Astor
Rendez-vous pour le récital !
dimanche 1er décembre 2024
Théâtre du capitole
Marina Rebeka
Qui oubliera jamais son incarnation miraculeuse de Norma au Capitole en 2019 ? Merveilleuse artiste de concert également, où elle livre les facettes les plus intimes de son extraordinaire personnalité artistique, Marina Rebeka revient en récital sur notre scène pour un programme entièrement consacré à Rachmaninov, un univers bouleversant qu’elle a à cœur de partager avec passion.