Les années 1770 sont pour le jeune Mozart, entre 15 et 25 ans, des années de formation, d’expérimentation et de conquête de soi. Car si la précocité fulgurante de l’enfant-prodige a sidéré l’Europe entière, le mûrissement d’un musicien de génie est un processus autrement plus profond et délicat. Il s’agit, à travers l’épreuve des formes conventionnelles en vigueur, d’affirmer un geste musical singulier : les premiers opéras buffa (La Finta semplice, La Finta Giardiniera), les opéras seria soumis au jugement des Milanais (Lucio Silla), mais aussi les airs de concert, véritables laboratoires de la voix ; le Singspiel (l’opéra-comique allemand) où s’affirme peu à peu la naissance d’un opéra national ; les Lieder enfin, qui flirtent avec la romance et l’ariette mais cherchent le chemin de ce qui deviendra le genre romantique par excellence. Tout ce qui était en germe s’épanouit, florissant.

Le programme vocal conçu par la merveilleuse pianiste Anne Le Bozec, compagne de route du Capitole, apparaît comme une touchante évocation de cette quête de soi. Car non seulement le style se singularise toujours plus nettement, mais l’expression des sentiments s’affine, s’irise de mille nuances pour atteindre à ce que Mozart a porté au sublime : le langage du cœur. Et jeunesse pour jeunesse, c’est à quatre jeunes talents qu’Anne Le Bozec a confié ce voyage musical en compagnie de Mozart jeune homme : avec Laurence Pouderoux, Apolline Raï-Westphal, Marion Vergez-Pascal et Lysandre Châlon, c’est une brillante génération qui, au Conservatoire de Paris, a étudié la musique de chambre auprès de l’éminente pédagogue et entre dans la carrière professionnelle avec un atout majeur : ils chantent avec la voix du cœur.